Né en 1926, en Pologne à Tarnow, Charles Denner et sa famille débarquent en France en 1930. Ils s’installent sous l’Occupation avec sa famille à Brive-la-Gaillarde, aidés par le rabbin de la ville, David Feuerwerker. C’est là qu’il rejoint les rangs de la Résistance avec son frère aîné Alfred. Grièvement blessé à la colonne vertébrale lors d’une embuscade, il est décoré de la croix de guerre.
Au lendemain du deuxième conflit mondial , il effectue quelques petits boulots comme tailleur et maroquinier, mais sa véritable passion, c’est le théâtre. Raison pour laquelle il entre au cours de Charles Dullin et intègre ensuite le Théâtre national populaire de Jean Vilar. L’occasion pour lui de se produire au Festival d’Avignon et de donner la réplique à des comédiens de sa génération aussi talentueux que Michel Galabru, Jeanne Moreau ou François Périer.
Au cinéma, quatorze ans après avoir été figurant dans le Volpone (1941) d’Yves Allégret, Charles Denner retrouve le cinéaste pour La Meilleure part. Il enchaîne avec un petit rôle, celui de l’adjoint de Cherrier, dans Ascenseur pour l’échafaud (1957) de Louis Malle. Mais c’est en 1962 qu’il accède à la consécration en incarnant le meurtrier Henri-Désiré Landru sous la houlette de Claude Chabrol. Ce dernier le dirigera à nouveau dans Les Plus belles escroqueries du monde (1964) et Marie-Chantal contre le docteur Kha (1965). Avec son regard grave, son timbre de voix si particulier et sa répartie non dénuée d’ironie, Charles Denner peut aussi bien jouer des voyous de médiocre envergure (Le Voleur de Louis Malle), des pères de famille respectables (Le Vieil homme et l’enfant ainsi que La Première fois de Claude Berri), des intellectuels retors (Z de Costa-Gavras, Les Assassins de l’ordre de Marcel Carné) que des personnages de marginaux (Mado de Claude Sautet, Mille milliards de dollars d’Henri Verneuil).
Dans les années 1970, ce second rôle incontournable réputé pour son magnétisme devient l’un des acteurs fétiches de Claude Lelouch pour qui il tourne pas moins de cinq longs métrages : Le Voyou (1970), L’Aventure, c’est L’aventure (1972), Toute une vie (1974), Si c’était à refaire (1976) – film qui lui vaut une nomination au César du Meilleur acteur dans un second rôle en 1977 – et Robert et Robert (1978), où il forme avec Jacques Villeret un tandem détonant de célibataires. Au cours de cette décennie, on le voit également côtoyer à trois reprises Jean-Paul Belmondo : pour Les Mariés de l’an II (1971), L’Héritier (1972) et Peur sur la ville (1975), film policier dans lequel il interprète l’inspecteur Moissac.
Mais c’est à François Truffaut qu’il doit l’un de ses plus beaux rôles, celui de L’Homme qui aimait les femmes. Sa prestation de séducteur volage et fétichiste lui vaut d’être nommé au César du meilleur acteur en 1978. Dans les années 1980, Charles Denner travaille avec une nouvelle génération de cinéastes comme Laurent Heynemann (Stella, 1983), Chantal Akerman (Golden Eighties, 1986) ou encore Jérôme Diamant-Berger (L’Unique, 1986). Il joue dans une pièce de Gille Ségal : Le marionnettiste de Lodz (dans Berlin en 1953, Finkelbaum rescapé d’un camp de concentration, vit terré dans un grenier…Sa concierge lui apporte de la nourriture et tente de le convaincre que la guerre est finie. Il est marionnettiste et juif. Il répète sans cesse le spectacle qui retracera sa vie. Personne ne parvient à le convaincre que le cauchemar est fini. Mais un ancien co-détenu vient le voir).
Un cancer de la gorge diagnostiqué en 1985 l’amènera à quitter définitivement les plateaux de cinéma. Il décède en 1995. Il est inhumé au cimetière de Bagneux.