Texte écrit par Yosef Tunkel (1881-1949), surnommé ‘’Der Tunkeler’.Poète et écrivain de prose humoristique yiddish. Né à Babruysk en Biélorussie, il étudie à l’école des beaux-arts de Vilnius. Après 1899, il abandonne la peinture (trop myope) et se tourne vers l’écriture. Il contribue à de nombreuses revues et voyage à travers le monde. Entre 1906 et 1910, il voyage aux Etats-Unis.Il créé la revue humoristique ‘Der kibitser’ qui deviendra ‘’Der groyser kundes’ En 1911, il repart à Varsovie, puis passe la première guerre mondiale en Ukraine. De retour à Varsovie, Il contribue au répertoire de divers cabarets, l’Azazel, le Sambatyon et à Lodz également. En 1931, il se rend en Palestine mandataire.
Quand la guerre éclate, il se trouve en Belgique d’où il s’échappe pour partir en France .Il se fait arrêter par les autorités de Vichy.Il s’échappe encore une fois et parvient à s’enfuir aux Etats Unis. Il décède en 1949 .
Dans une mercerie:
Discussion entre AB. Rosenstein, le vendeur et un acheteur
Acheteur : Montrez-moi du velours vert- foncé. Vous en avez ?
AB : Comment, nous n’aurions pas dU velours vert- foncé ? dans une société telle que AB.Rosenstein, il n’y aurait pas un peu de velours ? Mais c’est à se tordre de rire.
Acheteur : Alors soyez gentil et montrez le moi.
AB : Montrer quoi ?
Acheteur : le velours, montrez le moi.
AB : Ah le velours. Oui, un moment. Comme vous le voyez, je vais vous montrez un tel velours que vous allez en danser de joie (il tire un peu de marchandise de l’étagère, la déroule et la caresse avec la main).Voilà, vous vouliez voir un peu de tissu.
Acheteur : Excusez-moi, vous m’avez vraisemblablement mal entendu. Je vous ai demandé de me donner du velours vert- foncé et vous me montrez de la soie.
AB : Grimpant sur l’échelle et en extrayant un beau rouleau de tissu. Hmmm….Vous, monsieur, si vous demandiez au plus petit enfant de la ville : en quoi se distingue la société AB Rosenstein ? hé bien voilà en quoi..
Acheteur : Mais c’est noir !
AB. : Et quel velours voulez-vous ?
Acheteur : Bon sang, je vous ai déjà dit mille fois : vert -foncé, vert- foncé
AB : Et où est la différence ? Sur ma vie ,monsieur, prenez cela. C’est presque du vert- foncé. Ca ne peut pas être plus foncé que ça ! De nos jours tout le monde s’habille en noir.
C’est la dernière mode !
Acheteur : C’est bien possible, mais j’ai besoin de velours vert foncé
AB : Du velours ?
Acheteur : Bien sur du velours ! Ecoutez , ne me faites pas tourner en bourrique.Si vous avez du velours vert- foncé, ça ira. Sinon, j’irai dans une autre boutique.
AB : Ah, ah, ah, et surement chez Zisman l’escroc, celui qui a un bouton sur le nez .Il vous plumera et vous dépossèdera des quelques dollars pour lesquels vous aurez sué sang et eau. Et après ?
Acheteur : Au diable, vous me donnez mon velours vert- foncé ou pas ? (il crie) .Vous m’entendez ? Pas noir, pas bleu, pas jaune !
AB : C’est quoi le problème, monsieur, pourquoi avez-vous besoin de crier ? Vous voulez du velours, je vais vous chercher de suite du velours.En une minute, un instant.Combien de mètres en voulez vous…
Acheteur : Quatre et demi
Ab : Et pourquoi pas sept ?
In a shnit-krom
Kone: Tsaygt mir tunkel-grinem samet. Hot ir es?
A.B: Vos heyst, bay undz vet nisht zayn keyn tunkel-griner samet? In aza firme vi AB. Rosensteins zol nit zayn a shtikel samet? Dos iz dokh poshet a gelekhter.
Kone: To zayt zhe azoy gut un tsaygt mir.
A.B: Vos tsaygt?
Kone : Dem samet .Tsaygt mir.
A.B : Oh, dem samet.Shoyn, shoyn. Eyn regele. Ot vi ir zet, tsayg ikh aykh aza samet, az ir vet poshet geyn tantsn far simkhe. (er shtekt aroys a shtikl vare fun politse, viklt es funander un glet mit der hant).Nat , ir vilt zen a shtikl vare ?
Kone : Antshuldikt, ir hot mikh, varsheynlekh farhert. Ikh hob aykh gebetn ir zolt mir gebn tunkl -grinem samet un ir git mir nor zayd.
A.B aroyfkrikhndik oyfn layter un aroysshlependik a hibshn knoyl shtof : Hmmmmm..Ir, mister, git nor a freg dem kleynstn yingl in shtot : Mit vos tsaykhnet zikh oys AB Rozensteins firme ?..vel, ot hot ir es..
Kone : Ober dos iz shvarts
A.B : un velkhe samet vilt ir ?
Kone ; tsum tayvl, ikh hob dokh aykh shoyn toyznt mol gezogt ; tunkl- grinem, tunkl –grinem.
A.B : Tu vos zhe iz der khilek ? kh’lebn, mister nemt ot dem. Dos iz dokh oykh kimet gor tunkl -grin.Dakht zikh az nokh tunkeler ken nokh nisht zayn ! Ale trogn yetzt shvartse .
S’iz yetzt di rekhte mode !
Kone : es ken zayn, ober ikh darf tunkl- grinem samet.
A.B: Samet?.
Kone: nu gevis, samet! Hert; Dreyt mir nit keyn kop! Ir hot tunkl- grinem samet-iz gut.
Anit-gey ikh in an ander krom.
A.B: Hi,hi,hi un nokh mistome tsu Zisman der shvindler mit a pritshes oyf der noz, vos vet aykh aropshindn di hoyt un vet bay aykh tsunemen di etlekhe dolar, vos ir hot farhorevet mit blut un shveys..vos den?
Gut, gut ikh vel aykh tsaygn a shtikl vare vos ir vet a geshray ton: Mister Rozenshteyn! Shnaydt mir op derfun hundert yard !! Aha..ot dos iz es
Kone :Tsum tayvel! Ir git mir tunkl- grinem samet tsu nisht?( shrayt).
Ir hert? Nisht shvartsn , nisht bloy, nisht gel!
AB: Got iz mit aykh, mister, tsu vos badarft ir nokh shrayen. ? Ir vilt samet, vel ikh glaykh krign samet. In eyn rege, in eyn oygnblik..Vifil yard vilt ir?
Kone: Fir mit a halb
A.B:Far vos nisht zibn ?