SARA FORTIS

SARA FORTISNée à Chalkis, une petite ville dans l’île d’Eubée près d’Athènes, en Grèce, Sara Fortis n’avait jamais connu son père, décédé quand elle avait seulement deux mois. Elevée par sa mère, Sara et sa soeur eurent une enfance heureuse. Elles se considéraient comme grecques à 100%, mais honoraient aussi leur judéité en allumant les bougies chaque vendredi soir et en assistant aux offices à la synagogue lors des fêtes.
Lorsque les Allemands arrivèrent en 1941, Sara comprit qu’il était temps de quitter sa ville natale. Elle avait entendu parler de Juifs d’autres petites villes grecques déportés par les Nazis et ne revenant jamais. Sara et sa mère s’enfuirent dans le petit village de Kuturla et s’y cachèrent pendant un moment. Quand les Juifs n ‘y furent plus en sécurité, on demanda à Sara de partir. Les villageois acceptèrent cependant de cacher sa mère.
Une fois séparée de sa mère, Sara résolut de devenir une “andarte” (combattante de la résistance). Mais elle refusa de rester cantonnée aux tâches domestiques ou dans un rôle de soignante comme c’était en général le cas pour les femmes qui se joignaient à la résistance. “Je leur ai dit: si je suis femme partisan, j’aurai des droits, et je ferai quelque chose de comparable à ce que vous faites.”
Décidée à jouer un rôle important dans le groupe, elle entreprit d’aller de village en village à dos d’âne, pour recruter d’autres femmes désireuses de se battre.
“Ne considérez pas que la place des femmes est de rester à la maison”, leur expliquait-elle. “Les femmes peuvent aussi aider et jouer un rôle dans la résistance”.
Elle enseigna aux filles comment se comporter avec les hommes. “Elles venaient toutes de maisons où une fille ne parlait jamais à un homme et tout à coup je leur disais: “Vous êtes partisan maintenant. “Il est vraiment difficile pour une fille d’un village isolé d’apprendre à se comporter comme une égale parmi les hommes. Je pensais que petit à petit ces filles deviendraient différentes. J’ai réussi à leur enseigner cela.”
Le peloton était constamment en mouvement, n’avait pas de camp de base ou de refuge, dormait à la belle étoile et se déplaçait souvent avec les partisans masculins. Elles apprirent à tirer avec des armes de poing, à incendier des constructions, et à lancer des cocktails Molotov comme tactiques de diversion.
“Au début, les filles gloussaient, ‘Oh, allons-nous tenir des pistolets?’ Au bout d’un mois, c’était comme si elles étaient des filles complètement différentes “, raconte Sarika avec fierté. “Elles prenaient l’affaire plus au sérieux que moi.” Sarika s’inquiétait qu’après la guerre, les filles de sa brigade ne soient pas reprises dans leurs villages, qui avaient des règles strictes concernant la place d’une femme. Mais elles furent toutes acceptées, tout comme leur “Capitaine” parce que les villageois étaient fiers d’elles. Pour beaucoup de femmes cependant leurs vies retournèrent aux mêmes configurations sexistes qu’avant la guerre.

Sara forma donc un groupe d’une douzaine de femmes partisans qui devint indispensable aux combattants masculins.
Pour leur première mission, on leur ordonna de lancer des cocktails Molotov pour faire diversion et permettre aux partisans d’attaquer. Impressionnés par leurs capacités, les partisans masculins invitèrent le groupe féminin à se joindre à de nombreuses missions. Elles incendiaient des maisons et exécutaient des collaborateurs.
De nombreuses missions exécutées par les femmes étaient attribuées aux hommes, car il paraissait inconcevable que des femmes puissent accomplir de tels actes.
Souvent, les femmes devaient dormir avec les hommes et leur sécurité était pour Sara une préoccupation constante.

Sara devint une figure éminente et très respectée dans le mouvement de la résistance en Grèce. À l’âge de 18 ans, elle était connue sous le nom de «Kapetenissa (capitaine) Sarika». Les nazis envoyèrent un informateur pour tenter de la capturer, mais arrêtèrent par erreur, puis violèrent et assassinèrent brutalement sa cousine, Medi. Sara jura de la venger, retrouva l’informateur et l’exécuta.

Après la guerre, les “andartes” se trouvèrent en opposition au nouveau gouvernement grec. Sara fut arrêtée, mais en raison de sa réputation, elle fut relâchée peu de temps après. Elle émigra ensuite en Israël, où elle rencontra son mari et s’y installa.